Michael Powell, la passion iconoclaste du cinéma

 

23-25 juin 2005 - Charles V (Paris VII) / Résidence Lucien Paye (Cité Universitaire)

 

L'œuvre de Michael Powell (1905-1990), en une cinquantaine de films, se confond quasiment avec le premier siècle du cinéma, qu'elle traverse des années trente aux années soixante-dix. Powell a débuté sa carrière comme assistant de Rex Ingram au temps du muet, a commencé à réaliser des films (Quota Quickies puis longs métrages tels A l'angle du monde) dans les années trente, est devenu, avec son collaborateur Emeric Pressburger, le cinéaste officiel - mais ô combien audacieux - de la propagande britannique en temps de guerre (L'Espion noir, 49ème Parallèle, Colonel Blimp, etc.), a mis en scène des chefs d'œuvres exigeants dans les années 1945-1951 (Une Question de vie ou de mort, Le Narcisse noir, Les Chaussons rouges, La Renarde, Les Contes d'Hoffmann, etc.), et a vu son parcours interrompu par le scandale provoqué par Le Voyeur (1960) - film devenu « culte » depuis -, poursuivant cependant son activité, entre cinéma et télévision, jusqu'au milieu des années 1970.

En France, le statut de Michael Powell, cinéaste libre, indépendant et iconoclaste, est ambivalent, problématique, et mériterait à ce titre d'être interrogé : à la fois reconnu comme l'un des plus grands cinéastes britanniques, admiré de nombreux cinéastes, il souffre aussi d'un manque de considération véritable - lié, sans doute, à l'assertion péremptoire de François Truffaut selon laquelle il aurait existé une antinomie constitutive entre le mot « anglais » et le mot « cinéma », et la « doxa » durable que cette affirmation a installée -, et d'une certaine ignorance (due à la difficulté d'accès aux films). Il est temps donc, non seulement de réhabiliter, en France - qui n'a pas seule l'apanage de la cinéphilie -, l'importance de son œuvre, mais aussi et surtout de considérer celle-ci comme un réel et digne objet d'étude et de recherche.

L'œuvre de Michael Powell, abondante, éclectique et à la séduction retorse, compte des comédies sentimentales, des films « de guerre », des films de ballets, des documentaires, des fantaisies métaphysiques, des mélodrames. Un colloque en 2005, à l'occasion du centenaire de la naissance du cinéaste, devrait permettre à la fois de faire l'état des lieux de la recherche française sur ses films, et surtout, cette dernière étant fort peu développée, de donner à cette recherche un point d'ancrage et une impulsion.

 

Les pistes qui pourraient être explorées dans ce cadre, par des universitaires en études cinématographiques (esthétique et histoire du cinéma notamment), des anglicistes ou des historiens de l'art, sont nombreuses. En voici quelques unes : 

- La collaboration entre Michael Powell et Emeric Pressburger, de 1938 à 1956 (pour une quinzaine de films), sous la bannière de leur compagnie de production commune, The Archers (dès 1942).

- Analyse esthétique de films powelliens (cette approche serait particulièrement espérée)

- Le regard ; la couleur ; le temps ; questions de mise en scène (par exemple, la danse, ou la guerre) ; les personnages féminins ; la place du spectateur ; l'humour ; le cinéma et les autres arts

- Histoire de la réception de l'œuvre de Powell en France ; Powell et la cinéphilie française

- Le cinéma dans l'œuvre de Powell (dans Le Voyeur mais pas seulement)

- Powell et l'hybridité générique ; la tension entre l'empreinte du cinéma muet et les inventions de la « modernité »

- 1960 : Le Voyeur de Powell et Psychose d'Hitchcock

- La relation entre ses films et l'Histoire (par exemple, 49ème Parallèle, dont l'impact contribua à l'engagement des Etats-Unis dans la seconde guerre mondiale) ; l'audace des films de propagande (exemple, Colonel Blimp, qui retrace l'amitié entre un officier allemand et un officier anglais, de la guerre des Boers à la fin de la seconde guerre mondiale) ; la guerre, omniprésente et hors-champ 

- Les projets non aboutis de Powell (par exemple, son adaptation de La Tempête de Shakespeare ou son projet de film sur le peintre Pollock)

- L'influence de Powell chez d'autres cinéastes (aussi variés que Martin Scorsese, Brian De Palma, Jim Jarmusch, Vincente Minnelli, George Lucas, Jean-Pierre Melville, Bertrand Tavernier, Aki Kaurismäki, Nicolas Roeg ou Derek Jarman.).


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